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Littérature Adulte 2019-2020

                                                                                                                                                                     Novembre 2020

  « L'AUTRE MOITIE DE SOI »

  Brit BENNET

Ed. Autrement

 

  

 

Brit BENNETT est une auteure américaine. Elle a notamment écrit « Le cœur battant de nos pères », Prix « Lire » du meilleur roman étranger.

 

En Louisiane, les destins de jumelles si peu noires qu’elles peuvent passer pour blanches. Ou presque. À travers la quête d’identité de jumelles métisses dans l’Amérique contemporaine, Brit Bennett explore toutes les nuances du lien affectif dans une passionnante fresque familiale / Un grand roman de l’identité afro-américaine.

 

 

« BETTY »

Tiffany McDaniel

   Ed. Gallmeister

Prix du roman Fnac 2020
Prix America du meilleur roman 2020
Roman étranger préféré des libraires – Palmarès Livres Hebdo 2020
Prix des lecteurs de la Librairie Nouvelle de Voiron
Prix des lecteurs des librairies Attitudes

 

Une jolie fille blonde s’en est allée naguère avec un Indien cherokee… Betty est la sixième de leurs huit enfants. Après bien des déménagements, ils s’installent à Breathed, Ohio. Ce n’est pas l’abondance, mais avoir un papa magicien console des hostilités humaines. S’appuyant sur la nature, le père construit des rituels apaisants, fabrique de bienveillantes décoctions… Mais les disparitions successives de certains des enfants vont dévoiler d’effrayants secrets de famille, que Betty conjure en écrivant.

Chez le Cherokee, la puissance est féminine, dit le père. C’est ce qui aidera l’héroïne à affronter les secrets des siens, au sein des collines, bois et rivières, avec des animaux surprenants, une nature qui parle au cœur et, comme une éducation sentimentale, permet aux humains de découvrir leur vrai caractère. La vie quotidienne, le contact avec les autres enfants sont si difficiles que la famille est le seul refuge où le père ouvre aux enfants blessés des perspectives différentes. Ce livre est un chant, poétique, éperdu, cruel et tendre ; il révèle les talents, répare les tourments. Alors que le désespoir rôde, il en livre les clés.

Un hymne poignant, époustouflant et hors du commun adressé à son inspiratrice, la mère de l’auteure, Tiffany McDaniel.

 

 

 

 

 

« CHAVIRER »

Lola LAFON

Ed. Actes Sud 2020

Écrivain et musicienne, issue d’une famille aux origines franco-russo-polonaises, élevée à Sofia, Bucarest et Paris, Lola Lafon est l’auteur de trois romans publiés chez Flammarion : Une fièvre impossible à négocier (2003), De ça je me console (2007) et Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce (2011), désormais disponibles en Babel. En 2014, Actes Sud publie La petite communiste qui ne souriait jamais qui reçoit, de la part des libraires comme de la presse, un accueil enthousiaste. Et en 2017, paraît Mercy, Mary, Patty.
Dans le domaine musical, Lola Lafon compte deux albums à son actif : Grandir à l’envers de rien (Label Bleu / Harmonia Mundi, 2006) et Une vie de voleuse (Harmonia Mundi, 2011)

 

1984. Cléo, treize ans, qui vit entre ses parents une existence modeste en banlieue parisienne, se voit un jour proposer d'obtenir une bourse, délivrée par une mystérieuse Fondation, pour réaliser son rêve : devenir danseuse de modern jazz. Mais c'est un piège, sexuel, monnayable, qui se referme sur elle et dans lequel elle va entraîner d'autres collégiennes. 2019. Un fichier de photos est retrouvé sur le net, la police lance un appel à témoins à celles qui ont été victimes de la Fondation.

Chavirer suit les diverses étapes du destin de Cléo à travers le regard de ceux qui l'ont connue tandis que son personnage se diffracte et se recompose à l'envi, à l'image de nos identités mutantes et des mystères qui les gouvernent.

Revisitant les systèmes de prédation à l'aune de la fracture sociale et raciale, Lola Lafon propose ici une ardente méditation sur les impasses du pardon, tout en rendant hommage au monde de la variété populaire où le sourire est contractuel et les faux cils obligatoires, entre corps érotisé et corps souffrant, magie de la scène et coulisses des douleurs.

Très beau roman

 

 

 

 

 

 

 

 

« Rachel et les siens »

Metin ARDIT

Ed. Grasset

 

Metin ARDITI est un écrivain francophone d’origine turque, auteur de : LeTurquetto  prix CBPT 2011, la fille des Laugaris en 2007, Juliette dans son bain en 2015, La confrérie des moines en 2013 etc….

 

Jaffa 1917, Rachel vit dans une maison où cohabitent 2 familles qui n’en forment qu’une –ses parents des Juifs arabes et les Khalifa des arabes Chrétiens, parents de son frère de lait, son alter égo, Mounir âgé de 15 ans.

Au début du roman Rachel a 12 ans. C’est une enfant hors normes, très grande pour son âge, massive mais avec un ravissant visage. Ce qu’elle aime par-dessus tout c’est raconter des histoires. Son père tient un magasin de tissu et lorsqu’après l’école elle va livrer des lots d’étoffes aux clients, elle s’installe chez eux, invente des histoires et ravit tout le monde.

Outre Rachel et Mounir il y a Ida, la juive Ashkénaze, orpheline que ses parents ont adoptée, une ravissante blonde aux yeux bleus qui a l’âge de Rachel. L’arrivée d’Ida dans la maison trouble le tandem que formait Mounir et Rachel. Mais très vite ces trois- là tisseront entre eux des liens passionnels.

La question de la religion ne se pose pas jusqu’à l’arrivée massive des ashkénazes d’Europe de l’Est, qui ont fuient les pogroms et espèrent trouver « une terre de lait et de miel pour le peuple élu », des violences commencent à éclore. Beaucoup de juifs dont les Albakès, parents de Rachel, se réfugient dans des kibboutz, c’est là qu’elle découvre l’émerveillement du théâtre.

 En avril 1917 c’est le départ forcé, commencent alors des années d’exil. De Jaffa à Istanbul puis à Paris et Genève, Rachel tient bon grâce à sa vocation pour le théâtre, elle va devenir une grande dramaturge. Son engagement politique passe par ses pièces de théâtre. C’est à Paris qu’elle connaitra son 1er grand succès.

Par amour elle va épouser Karl, ils auront une fille Elisheva, père et fille périront dans un attentat aveugle. Puis elle s’attache à Maurice un juif d’Istanbul qui mourra en déportation, puis elle rencontre François-Xavier, diplomate français de haut rang, beau et brillant, anti sémite avec lequel elle partagera une passion torride. Elle aura une autre fille, Rebecca, qui n’arrivera pas à lui faire oublier Elisheva.

Le roman s’achève au décès de Rachel à Tel-Aviv le 28 septembre 1982

Metin Arditi signe un portrait de femme plein d’humanité et de nuances avec pour toile de fond les origines du conflit Israélo-Palestinien. Beaucoup de personnages très bien campés et attachants. C’est aussi un livre sur la tolérance et la nécessité d’aller vers l’autre. Pour Rachel les siens c’est tout le monde, ce sont les Juifs, les Arabes, les Chrétiens et les Palestiniens. J’ai beaucoup aimé ce roman.

 

 

« Havres de grâce »

Rose TREMAIN

Ed. JC Lattes

Bath, 1865. Jane, une jeune infirmière renommée pour ses talents extraordinaires, est convaincue qu’un autre destin se révèlera un jour à elle. Pourtant, lorsqu’elle se trouve écartelée entre une liaison sulfureuse avec une femme et la promesse d’un mariage conventionnel avec un médecin respectable, ses désirs l’orientent vers un avenir qu’elle n’avait jamais imaginé.
Au même moment à Bornéo, un excentrique « radjah » britannique, Sir Ralph Sauvage, débordant de philanthropie mais empêtré dans ses passions, voit ses projets compromis par sa propre fragilité, l’avidité innée des hommes et l’irrésistible force de la jungle.
La quête de Jane, en attente d’une vie différente, et les initiatives de Sir Ralph deviennent indissociables à mesure que le récit se déploie sur le globe. D’un salon de thé anglais aux forêts d’une île tropicale en passant par les taudis de Dublin et les magasins de costumiers libertins de Paris, un roman sulfureux, incandescent, inoubliable.

Traduction de l’anglais par Françoise du Sorbier

«  Un nouveau grand roman historique de Rose Tremain.» Livres Hebdo

 

 

« La Famille Martin »

David FOENKINOS,

Ed. Gallimard

 

Les principaux Romans de David Foenkinos  :

  • En 2009, La Délicatesse / Lennon, Plon, 2010 /Les Souvenirs, Gallimard, 2011 / Je vais mieux, Gallimard, 2013 /

  • Charlotte, Gallimard, 2014 / Le Mystère Henri Pick, Gallimard, 2016 /Vers la beauté, Gallimard, 2018 - Deux sœurs, Gallimard, 2019

  • L’auteur qui vient de se séparer de sa compagne est en manque d'inspiration. Comme aucun personnage ne réussit à investir son imaginaire, il décide de choisir la première personne repérée dans la rue et d'en faire le sujet de son prochain roman. Le hasard met Madeleine Tricot sur sa route. C'est une vieille dame de 80 ans. Bonne pioche : elle n'est pas ­méfiante, plutôt accommodante. Elle refuse de l'accompagner au café parce qu'elle a des aliments à mettre au congélateur, mais elle l'invite à la suivre chez elle. Plus tard, il lui demande la raison de cette confiance. "Vous avez une tête d'écrivain", lui répond-elle. Bref! Il plaît beaucoup à Madeleine Tricot qui vit à Paris dans le même quartier depuis quarante-deux ans, a été couturière chez Chanel et Lagerfeld et est la veuve depuis vingt ans d'un cadre de la RATP dont elle a eu 2 filles. Mais, avant de se marier, Madeleine a vécu un grand amour avec Yves, jeune homme brillant qui, du jour au lendemain, l'a plaquée pour aller vivre aux États Unis. Elle ne l'a jamais revu. Ses filles sont brouillées l’une est partie à Boston, l’autre Valérie vit à Paris Elle est l’épouse de Patrick Martin, agent d'assurances qui attend prochainement son licenciement. Les Martin et leurs deux enfants, un garçon et une fille accueillent l'écrivain avec plus de réticence que la vieille dame, mais il ne leur déplairait pas, à eux aussi, d'entrer dans un livre à succès

  •  

  • Dès les premières confidences de la vieille dame, l’auteur entre dans ses souvenirs, dans son intimité, dans sa vie. Et il fera beaucoup plus, il l’aidera à renouer avec son grand amour de jeunesse. De même avec les Martin, il est mieux qu’une oreille attentive, il intervient, il s’immisce, il joue un rôle important,  voir déterminant. Sous le fallacieux prétexte d’un livre à écrire et, en dépit de son souci constant de ne pas endommager l’écosystème des Martin, l’auteur en devient un élément perturbateur en orchestrant des péripéties pleines d’un suspense forcément romanesque et en se remettant lui-même en question.

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  • Une comédie pétillante qui se lit d’une traite, les personnages sont attachants et l’humour ironique de David Foenkinos fait mouche.

Février 2020

≪Le silence d’Isra≫

de RUM Etaf

Ed. L’observatoire

PALESTINE, 1990. Isra, 17 ans, préfère lire en cachette et s'évader dans les méandres de son imagination plutôt que de s'essayer à séduire les prétendants que son père a choisis pour elle. Mais ses rêves de liberté tournent court : avant même son dix-huitième anniversaire, la jeune fille est mariée et forcée de s'installer à Brooklyn, où vivent son époux et sa nouvelle famille. La tête encore pleine de chimères adolescentes, Isra espère trouver aux États-Unis une vie meilleure mais déchante vite : les femmes sont cloitrées à la maison, avec les enfants ; les maris, peu loquaces, travaillent jour et nuit. Invisible aux yeux du monde, la jeune fille autrefois rêveuse disparaît peu à peu face à la tyrannie de sa belle-mère et la pression étouffante de devoir donner naissance à un fils. Mais comble du déshonneur, Isra ne met au monde que des filles, dont la fougueuse Deya. BROOKLYN, 2008. Deya, 18 ans, est en âge d'être mariée. Elle vit avec ses soeurs et ses grands-parents, qui lui cherchent déjà un fiancé. Mais la révolte gronde en Deya, qui rêve d'aller à l'université et se souvient combien sa mère était malheureuse, recluse et seule. Alors qu'est révélé un secret bien gardé, Deya découvre que les femmes de sa famille sont plus rebelles que ce qu'elle croyait et y puise la force de changer enfin le cours de son destin. Dans ce premier roman aux accents autobiographiques d'une force inouïe, Etaf Rum pose un regard toujours nuancé sur la force libératrice de la littérature pour les plus faibles et les opprimés et sur les conflits intérieurs des femmes d'aujourd'hui, prises en étau entre aspirations et traditions.

 

 

≪Tous les vivants≫

MORGAN CE 

Ed. Gallimard

La jeune orpheline Aloma quitte brutalement son poste de professeur de piano d'une école missionnaire catholique pour suivre son petit ami Orren, cultivateur de tabac, dont la famille vient d’être décimée dans un accident de voiture. Au coeur des montagnes arides du Kentucky, la ferme est isolée et intimidante. La sécheresse qui menace les plants envahit l’esprit du fermier qui ne décèle pas la solitude et l’ennui de sa compagne.

  

Un titre biblique tiré d’un verset de l’Ecclésiaste pour une fable qui met en scène trois personnages dont le prédicateur protestant. Dans ce premier roman publié en 2009, C.E. Morgan, étudiante en théologie, fait évoluer ces trois solitaires en quête de réconfort dans une Amérique rurale dont elle connaît bien l’âpreté du quotidien et le rôle social du clergé. Déconcertée par la cruauté de la terre et le mutisme de son compagnon, la jeune femme se réfugie dans la pratique du piano à l’église, sa seule échappatoire. Un sens prononcé du détail, des descriptions lyriques de lumières et de paysages, une progression linéaire qui facilite la lecture et nous attache à ces personnages touchants par la pudeur de leurs sentiments et les non-dits de ces travailleurs de la terre.  (S.D. et Maje)

 

 

≪Le théâtre des nuits≫ 

ADERHOLD Carl.

Ed. Stock

Trois coups dans la nuit. Le rideau se lève. « Il n’y a pas de plus belle mort que de mourir pour la patrie ! » Le comédien s’avance sur la scène d’un air martial. Et sa moustache se décroche…

Blanche Baulieu, une beauté déjà cabossée par la vie, tourne depuis le début de la guerre dans les théâtres parisiens en rêvant de devenir une grande actrice. Mais les temps sont durs et elle peine à trouver sa place. Alors, quand on lui propose d’intégrer le théâtre aux armées, elle n’hésite pas une seconde.

Blanche débarque sur le Front des Vosges en 1917, avec un groupe de comédiennes parisiennes mené par Sarah Bernhardt. L'objectif est clair : remonter le moral des troupes et contribuer à la victoire nationale. C'est Antoine qui vient la chercher à la gare. Un poilu. Un taiseux. Un jeune homme.  Son cœur s’emballe mais autour d’eux la neige tombe. Et les ennemis veillent.

Une histoire d'amour bouleversante, traversée par l'Histoire, qui dépeint une guerre où tout est théâtre.

 

 

≪Le bon sens≫

 BERNARD Michel.

Ed. La Table ronde

En 1449, à Rouen, Guillaume Manchon, prêtre en charge de la bibliothèque de l’archevêché depuis trente ans, conserve avec un soin jaloux le procès-verbal du jugement qui a condamné Jeanne d’Arc en 1431. Il l’avait rédigé en tant que greffier et traduit en latin. Mais une révision du procès s’impose quand le roi Charles VII chasse les Anglais de France…

  

Dans ce roman historique, Michel Bernard s’attache, comme dans son précédent récit (Le Bon coeur, HdN décembre 2017), à l’épopée de la Pucelle et plus particulièrement aux années qui ont suivi son exécution inique. Il s’appuie sur une solide documentation pour dénoncer le rôle détestable de l’évêque Cauchon et de la Sorbonne. La révision du procès en hérésie et la réhabilitation de Jeanne d’Arc ont été possibles grâce à des hommes de bonne volonté, alors même que les coupables ont réussi à se hisser aux plus hautes fonctions. L’auteur ne donne pas une image très flatteuse d’un roi peint par Jean Fouquet mais fait revivre avec un certain lyrisme la figure aussi touchante que charismatique d’une jeune guerrière au coeur pur. Un roman passionnant sur la fin de la Guerre de Cent Ans et ses conséquences. (E.L. et A.K.

 

 

≪Le courage des autres≫

BORIS Hugo.

Ed. Grasset

Hugo Boris vient de passer sa ceinture noire de karaté lorsqu’il fait face à une altercation dans le RER. Sidéré, incapable d’intervenir, il se contente de tirer la sonnette d’alarme. L’épisode révèle une peur profonde, mélange d’impuissance et de timidité au quotidien. Trait de caractère personnel ou difficulté universelle à affronter l’autre en société ? Ce manque de courage l’obsède. Sa femme lui suggère de «  se faire casser la gueule une bonne fois pour toutes  » pour l’exorciser.
 
Mais Hugo Boris est écrivain, alors, pendant quinze ans, il consigne sur le vif ces situations d’effroi dans les transports en commun. Il peint aussi le ravissement d’une rencontre, l’humanité d’un dialogue, l’humour d’un échange imprévu. À travers ces miscellanées heureuses ou tragiques, il décrypte une mythologie contemporaine, celle du métro et du RER, et cherche à appréhender ses craintes, à la maîtriser par la distance, la littérature ou… la lecture de Dragon Magazine  !
 
Il tente aussi de conjurer sa peur en guettant le courage des autres sous toutes ses formes, profondément admiratif de tous ceux qui parviennent à intervenir lorsqu’une situation les interpelle, les sollicite, exige une prise de parole, un geste. Il dessine un hommage à tous ceux qu’il a vu avoir, sous ses yeux, le cran qui lui manquait. Et se demande si le courage est contagieux.
 
Totalement original, sincère, d’une actualité, d’une précision d’écriture et d’observation remarquables, ce recueil de textes brefs touche au plus juste. En se mettant à nu, Hugo Boris parle de chacun de nous, de nos lâchetés et de nos malaises quotidiens, de nos éblouissements et, parfois, de nos héroïsmes.

 

 

≪Propriétés privées≫

SHRIVER Lionel.

Ed. Belfond

Ne dit-on pas que les choses que l'on possède finissent toujours par nous posséder ?

Alors que son meilleur ami décide de l'exclure de sa vie, une artiste tente de récupérer le cadeau démesuré qu'elle lui avait offert.
Un couple entreprend de bouter hors de chez lui son fils de trente ans qui, en bon millenial, va mettre en scène cet " abandon " sur les réseaux sociaux et devenir une star du net.
Un businessman détourne l'argent de son entreprise et s'envole pour une vie dorée au soleil, avant de se voir rongé par la culpabilité.
Une femme s'acharne à posséder une maison qui ne veut pas d'elle...

Portées par la verve sarcastique, l'esprit d'analyse, la provocation d'une Shriver au meilleur de sa forme, douze histoires sur un sujet aussi inattendu que central : la propriété. Celle que nous nous octroyons sur les autres, sur les objets, celle qui définit notre statut social, celle qui nous aliène aussi.

Critique acerbe de nos sociétés malades, miroir peu flatteur de notre course effrénée à la possession, une œuvre d'une brûlante actualité, salutaire et éclairante.

Janvier 2020

≪Des humains sur fond blanc≫

MAUDET Jean-Baptiste 

Ed. La Passage

Avec Des humains sur fond blanc, à la croisée du roman d'aventure et de l'errance existentielle, Jean-Baptiste Maudet nous conduit de la Mer Noire aux confins sibériens, là où s'éprouvent les cœurs.

On prétend que des rennes contaminés par la radioactivité se dispersent dans le Grand Nord. Tatiana, une scientifique moscovite, est envoyée sur place, en Sibérie. Un pilote fantasque, retraité de l'armée soviétique, l'accompagne ainsi qu'une interprète, la jeune Neva, qui parle la langue des éleveurs nomades présents dans la région. Ce trio incertain monte à bord d'un vieil Antonov en direction du Nord et de l'hiver qui vient.
En route, rien ne se passe comme prévu. Qu'est-il d'ailleurs possible de prévoir dans cette immense Russie où la neige recouvre les traces des humains ? Lorsque la vie ne tient plus qu'à la flamme d'une bougie, les ombres portées transforment le monde : l'allure des troupeaux, les mots de Pouchkine, les tigres des rêves et les trésors gelés des profondeurs. La meilleure façon, drôle ou tragique, de passer le temps est certainement de s'enivrer en racontant des histoires, celles que l'on invente, celles que l'on confond, celles que l'on emporte dans la nuit.
Le blanc n'est-il que la couleur du froid et de l'oubli ou bien celle du désir de tout recommencer ?

 

 

≪Johannesburg≫

MELROSE Fiona

Ed. Quai Voltaire

Le 6 décembre 2013, Gin, qui est revenue de New York où elle vit depuis plus de vingt ans, se prépare à organiser une fête à Johannesbourg pour les quatre-vingts ans de sa mère. Le même jour, à l’annonce de la mort de Mandela, une foule bigarrée converge vers sa résidence située à quelques rues de là. Dans une ambiance électrique, Gin plonge dans le passé douloureux qu’elle avait voulu fuir.

 

 

Fiona Melrose, qui vit entre le Royaume-Uni et l’Afrique du Sud, décrit dans ce deuxième roman (Midwinter, NB avril 2018) une ville qu’elle connaît bien. Son écriture très suggestive évoque la chaleur suffocante, le vacarme des rues, l’insécurité permanente, les inégalités sociales et la violence de l’apartheid, mais aussi la beauté des paysages, des jardins luxuriants et des compositions florales. La voix donnée à chacun des personnages restitue la complexité des caractères, les multiples interactions entre les uns et les autres, les hésitations et les non-dits dans un va-et-vient permanent entre le présent et les ombres du passé. Ce roman polyphonique porte l’immense espoir de liberté de tous ceux qui sont brimés par la ségrégation sociale ou étouffés par les contraintes d’une société arrogante, bloquée dans sa suffisance.  (A.-M.G. et C.-M.T.)

 

 

≪La fille de l’espagnole≫

SAINZ BORGO Karina

Ed. Gallimard

Venezuela : Adelaida enterre sa mère dans un Caracas à feu et à sang, en proie aux émeutes, à la famine et à la guerre civile. Ne pouvant rentrer dans son appartement investi et sauvagement mis à sac par un commando de femmes au service des Fils de la Révolution, elle se réfugie chez sa voisine, une immigrée espagnole qu’elle découvre morte. Entrevoyant une issue vers la liberté, elle décide d'usurper son identité pour fuir vers l’Espagne. 

 

 

Née à Caracas, Karina Sainz Borgo a commencé une carrière de journaliste dans son pays avant d’émigrer à Madrid où elle vit depuis dix ans. Son premier livre, très court, dont certains épisodes et quelques personnages sont inspirés de faits réels, est terrifiant. Par la voix de son héroïne, elle y décrit d’une plume puissante, empreinte d’une sombre poésie, la situation politique et l’existence misérable des habitants d'un pays en perdition où règnent la terreur, la corruption, la faim, l’insécurité, le désespoir. On est littéralement pris à la gorge par l’histoire déchirante de cette jeune femme prise au piège. Un roman coup de poing dans lequel on ressent tout l’amour de l’auteure pour son pays en lambeaux.  (V.A. et M.-N.P.)

 

 

≪Nus≫

BECDELIEVRE Laure

Ed. Plon

Mathilde est modèle vivant de nu artistique en ateliers et écoles d'art. Son métier la pose et la comble, malgré la rupture avec sa mère que ce choix de vie lui a value dix ans plus tôt.
Drôle de métier pourtant, lorsqu'on tombe enceinte et qu'on peut difficilement cacher son corps qui change. Du jour où Mathilde attend un enfant, ses repères sont bouleversés, dans sa vie de muse comme dans sa vie de couple.
Son intimité lui échappe. Mais elle se sent aussi habitée, plus que jamais. Parée d'une nudité épaisse, lui donnant des forces inattendues pour affronter un monde qui a perdu ce qui lui restait d'insouciance, et où d'une balle de kalachnikov on peut perdre un ami.
Un premier roman sensible et poétique sur la création et l'expérience de donner la vie, envers et contre tout.

 

 

≪La belle hélène≫

ROZE Pascale

Ed. Stock

La lecture enrichit la vie comme la vie enrichit la lecture, c'est à cet art de lire qu'Hélène Bourguignon exerce ses étudiants de Sciences-po. Lire pour découvrir les expériences fondamentales à travers Buzzati, Tchékov, Reza.

Chaque cours est un défi recommencé, d’une semaine à l’autre il se passe toujours quelque chose. Un souvenir, une émotion, une réaction et tout déraille dans la vie si organisée d’Hélène Bourguignon. Elle a perdu son mari, mais elle n’a perdu ni sa sensibilité ni sa fantaisie. Lorsqu’elle répond aux questions de ses étudiants, lorsqu’elle accepte une invitation à dîner, le présent est là, dans son intensité.

Et cette joie de vivre chaque instant pleinement devient communicative. Bientôt le lecteur aimerait croiser cette femme, marchant boulevard Pereire, ou bouquinant dans le transat du jardin de son immeuble, car elle est libre. Elle est libre d’entendre ce qu’un personnage de Tchekhov éprouve, comme elle est libre d’écouter les propositions d’un homme. Et de croire à un nouveau départ.

Un roman tour à tour émouvant, cocasse, et intime. Pascale Roze suit le regard de cette femme solitaire et lumineuse pour évoquer des lieux, Paris, la Bourgogne, la Corse ; jusqu’au finale, qui esquisse la possibilité d’une seconde jeunesse.

 

 

≪Là ou chantent les écrevisses≫

OWENS Delia

Ed. Seuil

Caroline du Nord, 1952. Kya, six ans, vit dans une sinistre bicoque perdue dans le marais. Après une violente raclée du père alcoolique, sa mère s’en va, et bientôt ses aînés font de même. Kya survit, en symbiose avec une nature sauvage et pourtant bienveillante. Personne ne s’occupe d’elle, son père disparaît… À dix ans, elle conduit magistralement son bateau et vit de sa pêche. Quand un ami de son frère lui apprend à lire tout change : elle devient une experte du marais et écrit des ouvrages remarquables. Mais elle tombe amoureuse d’un séducteur qui fait une chute mortelle : accident, meurtre ?…

 

 

La zoologiste Délia Owens a choisi pour son premier roman foisonnant un lieu étrange et somptueux qu’elle connaît bien. La nature quasiment inviolée, magnifiquement évoquée, est un personnage à part entière. Jusqu’en 1970, on vit avec l'héroïne dont la solitude, l'isolement et un incroyable instinct de survie forgent le caractère. Tous les mots sonnent juste, ainsi que l'étude sociologique de la société américaine, dure et raciste, mais qui s’amende peu à peu. Le roman d’apprentissage devient thriller. Haletant jusqu’au bout, il remporte un succès phénoménal aux États-Unis. Une adaptation cinématographique est en cours. (A.-C.C.-M. et M.-C.A.)

Décembre 2019

≪Estuaire≫

JORGE Lidia 

Ed. Albin Michel

À son retour de mission humanitaire au Kenya, Edmundo Galeano, vingt-sept ans, une main mutilée, rejoint la demeure familiale près de l’estuaire du Tage à Lisbonne. Il y retrouve ses cinq frères et soeur qui entourent leur père, armateur. Edmundo veut écrire un livre sur l’enfer du monde, une épopée violente sur les réfugiés intitulée "2030". Projet mûri tandis que s’effondre cette famille ruinée par la crise économique qui la plonge dans le chaos.

 

 

Ce grand roman choral, ingénieux, joue sur plusieurs thèmes : la difficulté d’une création littéraire, la déconstruction d’un équilibre familial qui fait resurgir caractères et situations du clan où se dévoilent des individualités au destin tragique, un grand amour inoubliable, la volonté que tout retrouve sa place. L’auteure (Les Mémorables, HdN mai 2015) fait ressortir avec sensibilité et finesse la petite musique intérieure de chacun, sa part d’irrationnel, de rêve que le héros, futur écrivain, retiendra finalement. Le charme du roman repose sur une écriture tendue, sans dialogue, où de longs paragraphes très narratifs alternent avec une phrase unique souvent révélatrice d’une obsession. Homère et Pessoa habitent aussi ce très beau livre exigeant, envoûtant et d’une grande humanité. (A.C. et M.S.-A.)

 

 

≪Ordinary people≫

EVANS Diana

Ed. Globe

Voilà treize ans qu'ils sont ensemble. Pourquoi le pronom "je" a-t-il disparu, corps et âme, de la langue de leurs couples ? Quand les bras grands ouverts de la maternité se sont-ils refermés comme les dents d'un piège ? A Londres, dans une ville amoureusement parcourue et habitée, de l'élection de Barack Obama à la mort de Michael Jackson, deux couples se débattent avec leur histoire, le travail, la quarantaine, les illusions perdues, et leur statut d'émigrés de la deuxième génération devenus parents à leur tour. Ils ont cru à l'intégration, voilà qu'ils se désintègrent. Là-haut, sur sa colline de la rive sud, le phare du Crystal Palace veille sur eux. Doit-on, comme lui, accepter de voir les facettes et les façades de la vie tomber en mille morceaux pour qu'elle soit rebâtie ailleurs, en trois fois plus grand ? Avec brio, avec verve, avec un scalpel trempé dans un élixir de poésie, Diana Evans répond. Sélection prix Femina étranger 2019

 

 

≪Les cent puits de Salaga≫

HARRUNA Ayesha Attah

Ed. Gaïa

Au XIXème siècle, dans l’actuel Ghana, déchiré par des guerres tribales et convoité par les puissances européennes, dont l’Allemagne, deux jeunes filles nubiles vont être mariées contre leur gré. Tout semble opposer Aminah, modeste peule d’une beauté remarquable à Wurche, princesse de Salaga au caractère bien trempé. Elles rêvent toutes deux de liberté et leurs destins vont se croiser.

 

 

 

Traduite pour la première fois en français, la plume romanesque de cette jeune auteure ghanéenne, arrière-arrière-petite-fille d’esclave, restitue une période sombre de l’histoire de son pays. Alors que l’esclavage international est pratiquement aboli en Afrique, de longues caravanes de captifs, butin de violentes razzias, traversent encore le Ghana pour rallier Salaga, un des grands marchés aux esclaves qui alimente la demande locale. Cet asservissement peut prendre plusieurs formes et les deux héroïnes ont un point commun ; chacune tente d’échapper à sa condition. Inscrit dans un contexte géopolitique que l’on découvre avec intérêt, ce roman écrit contre l’oubli, très classique dans sa forme propose différentes grilles de lecture pour dénoncer toutes les formes de dépendance et le trafic d’êtres humains. Instructif, dépaysant, facile à lire. (R.C-G. et C.-M.T.)

 

 

≪Autoportrait avec garçon≫

LYON Rachel

Ed. Plon

Brooklyn dans les années 1990. Lu Rile, jeune femme de vingt-sept ans passionnée par la photographie, habite un loft délabré dans une résidence d’artistes mal entretenue. Sa vie est compliquée, elle enchaîne les petits boulots pour payer son loyer. Un jour elle se prend en photo sur sa terrasse ; au moment où l’appareil se déclenche elle entend des hurlements : à l’étage du dessus un garçonnet vient de tomber du toit. Le décès de l’enfant va-t-il la rapprocher de ses voisins ?

 

 

Dans ce premier roman, Rachel Lyon fait revivre un quartier de Brooklyn d’avant la gentrification : clochards, paumés, artistes fauchés, tous se côtoient, ivres d’une liberté revendiquée. Les personnages sont très bien cernés. On voit l’ambition, le désir de percer, de se faire un nom dans le monde sans concession de l’art, mais aussi les rivalités et les compromissions. La tension de cette intrigue très originale ne retombe pas, animée par ces squatters d’un autre temps et le destin de l’héroïne face à ses dilemmes. Le style est précis, vivant et factuel, et surtout l’humour new-yorkais, un peu grinçant, fonctionne bien. (B.Bo. et C.-M.T.)

 

 

 

≪Une rivière dans les arbres≫

O’MAHONY Jacqueline

Ed. Les Escales

Dans la campagne irlandaise, à plus d'un siècle d'écart, deux femmes affrontent les tourments de l'histoire et de leurs vies.

Irlande, 1919. Le pays est en ébullition, tiraillé entre les colons britanniques et les indépendantistes. Bravant le risque d'être découverts par les
Black and Tans, des factions armées à la solde du gouvernement chargées d'éliminer les résistants, Hannah O'Donovan et sa famille cachent dans leur ferme un petit groupe de rebelles. Entre leur chef O'Riada, un jeune homme sombre et courageux, et Hannah, une relation passionnée naît aussitôt...



Londres, 2019. Ellen, qui a quitté l'Irlande pour l'Angleterre il y a plusieurs années, est dans une impasse : endeuillée, son mariage vacille et sa carrière s'enlise. Lorsqu'elle apprend que la ferme qui appartenait à ses ancêtres est mise en vente, Ellen revient dans le pays de son enfance et plonge dans le passé familial. Pourquoi sa famille a-t-elle toujours refusé de parler de sa mystérieuse arrière-grande-tante, Hannah O'Donovan ?

 

 

≪La fabrique des salauds≫

KRAUS Chris

Ed. Belfond

Issus de l'aristocratie balte allemande, deux frères grandissent avec Ev, petite Juive adoptée. La guerre éclate, fait de l'aîné un officier nazi, du second un agent double, triple au besoin. Aux amours enfantines, aux heures lumineuses, succèdent meurtres, dénonciations, retournements. Ev épouse l'un des frères, vit avec l'autre la durée d'un épisode israélien, les rivalités s'attisent, une enfant meurt. Le cadet, hospitalisé, vieillissant, se risque dans les zones sombres de la mémoire.

 

 

Est-ce un roman d’espionnage ? Assurément. Tout est dit sur les services secrets, BND, CIA, Mossad, Stasi ou KGB. Un reportage ironique et pertinent sur les relations internationales d’alors ? Sur la guerre en pays baltes, en Pologne, en Allemagne ? Tout autant. Une tragédie amoureuse quasi-mythique ? Aussi bien. Débordant, compliqué, terrifiant par son déni d'humanité et de morale, par les tortures et les exécutions, le roman s'écoule lentement, détaille un paysage, un tableau, un moment de bonheur, explore les mécanismes du désir, de la haine, des liens fraternels et amoureux, leurs loyautés et leurs trahisons. On pourrait presque s'attacher au narrateur, peintre cultivé, proche des femmes, salaud magnifique qui sur son lit d'hôpital fait de son voisin de chambre un auditeur bénévole horrifié. Entrez sans faiblir dans ce monument littéraire. (M.W. et A.Lec.)

 

 

≪Le livre des martyrs américains≫

OATES Joyce Carol

Ed. Ph Rey

2 novembre 1999. Luther Dunphy prend la route du Centre des femmes d'une petite ville de l'Ohio et, se sentant investi de la mission de soldat de Dieu, tire à bout portant sur le Dr Augustus Voorhees, l'un des " médecins avorteurs " du centre.
De façon éblouissante, Joyce Carol Oates dévoile les mécanismes qui ont mené à cet acte meurtrier : Luther Dunphy est à la fois un père rongé par la culpabilité car responsable de l'accident qui a causé la mort d'une de ses filles, et un mari démuni face à la dépression de sa femme. Pour ne pas sombrer, il se raccroche à son église où il fait la rencontre décisive du professeur Wohlman, activiste anti-avortement chez qui il croit entendre la voix de Dieu. Comme un sens enfin donné à sa vie, il se sent lui aussi chargé de défendre les enfants à naître, peu importe le prix à payer.
Dans un camp comme dans l'autre, chacun est convaincu du bien-fondé de ses actions. Mené par des idéaux humanistes, Augustus Voorhees, le docteur assassiné, a consacré sa vie entière à la défense du droit des femmes à disposer de leur corps. Les morts de Luther et d'Augustus laissent derrière eux femmes et enfants, en première ligne du virulent débat américain sur l'avortement. En particulier les filles des deux hommes, Naomi Voorhees et Dawn Dunphy, obsédées par la mémoire de leurs pères.
La puissance de ce livre réside dans l'humanité que l'auteure confère à chacun des personnages, qu'ils soient " pro-vie " ou " pro-choix ". Sans jamais prendre position, elle rend compte d'une réalité trop complexe pour reposer sur des oppositions binaires. Le lecteur est ainsi mis à l'épreuve car confronté à la question principale : entre les fœtus avortés, les médecins assassinés ou les " soldats de Dieu " condamnés à la peine capitale, qui sont les véritables martyrs américains ?
Joyce Carol Oates offre le portrait acéré et remarquable d'une société ébranlée dans ses valeurs profondes face à l'avortement, sujet d'une brûlante actualité qui déchire avec violence le peuple américain.

Novembre 2019

≪La fuite en héritage≫

Mc GRATH Paula

Ed. Quai Voltaire

Irlande, 2012. Elle est aujourd'hui gynécologue à Dublin où sa mère est atteinte de la maladie d'Alzheimer. Elle, c'est Jasmine, née Rosemary, trente ans plus tôt adolescente rebelle et fugueuse, sauvée de sa marginalité par la pratique de la boxe, discipline qui la ramènera, dans la douleur, sur la voie des études. Tennessee 2012 : Alison, orpheline mineure, ne peut supporter sa nouvelle vie chez ses grands-parents paternels. Sa fuite avec une bande de bikers peu recommandables tourne mal. Quel passé enfoui lie ces deux destins?

 

 

La violence faite aux femmes, aussi bien morale que physique, est au centre de ce roman de Paula McGrath (Génération, NB mars 2017), qui tisse un récit polyphonique sur trois générations, de femmes confrontées chacune à la société de son époque : l'Irlande des années 80, brisant des vies de jeunes filles au nom de la moralité, ou celle des années 2010 toujours figée sur ses prises de position morales face à l'avortement par exemple; elle montre également l’autre violence, quel que soit le continent, liée aux dérives de la drogue ou du sexe. Malgré une écriture souvent crue et quelques scènes difficiles, la lecture n'est pas exempte d'humanité ni d’espoir.  (M.M. et A.Le.)

 

 

≪De pierre et d’os≫

COURNUT Bérengère

Ed. Le Tripode

" Les Inuit sont un peuple de chasseurs nomades se déployant dans l'Arctique depuis un millier d'années. Jusqu'à très récemment, ils n'avaient d'autres ressources à leur survie que les animaux qu'ils chassaient, les pierres laissées libres par la terre gelée, les plantes et les baies poussant au soleil de minuit. Ils partagent leur territoire immense avec nombre d'animaux plus ou moins migrateurs, mais aussi avec les esprits et les éléments. L'eau sous toutes ses formes est leur univers constant, le vent entre dans leurs oreilles et ressort de leurs gorges en souffles rauques. Pour toutes les occasions, ils ont des chants, qu'accompagne parfois le battement des tambours chamaniques. " (note liminaire du roman)

Dans ce monde des confins, une nuit, une fracture de la banquise sépare une jeune femme inuit de sa famille. Uqsuralik se voit livrée à elle-même, plongée dans la pénombre et le froid polaire. Elle n'a d'autre solution pour survivre que d'avancer, trouver un refuge. Commence ainsi pour elle, dans des conditions extrêmes, le chemin d'une quête qui, au-delà des vastitudes de l'espace arctique, va lui révéler son monde intérieur.

 

 

≪L’envol du sari≫

GIROUD Nicole

Ed. Les Escales

Anusha, Indienne parsie d’une cinquantaine d’années, travaille dans une organisation internationale à Genève. Sa mère est morte dans l’accident de l’avion d’Air India, le Kangchenjunga, qui s’est écrasé sur le Mont Blanc en 1966. Revenant sur les lieux de la catastrophe, Anusha rencontre un écrivain qui s’empare de son histoire et souhaite écrire un roman sur la vie de sa mère, la belle Rashna. Pourquoi était-elle dans l’avion? Pourquoi portait-elle sur sa poitrine nue un magnifique pectoral en or et diamants? Où se trouve-t-il ? A partir de détails racontés par Anusha, une histoire va se construire.

 

 

 

Bien documentée, Nicole Giroud en profite pour détailler les coutumes de la communauté parsie dont il ne reste que 200.000 pratiquants dans le monde, et c’est ce qui intéresse. Entremêlant les souvenirs de l’héroïne et l’imagination du romancier, l’auteur embrouille le lecteur qui a du mal à distinguer le vrai du faux. On vit la belle histoire d’un amour interdit dans l’Inde tumultueuse des années cinquante au moment de l’Indépendance et de la Partition. La description colorée de la vie des riches habitants de Bombay, adeptes du Zoroastrisme, est certainement la partie la plus intéressante de ce livre qui comporte quelques erreurs et dont l’écriture est un peu plate. 

 

 

 

≪La petite sonneuse de cloches≫

ATTAL Jérôme

Ed. R Laffont

Deux époques entrelacées, deux histoires d'amour qui se confondent en une chasse au trésor fiévreuse et romantique dans les rues de Londres.

1793. Le jeune Chateaubriand s'est exilé à Londres pour échapper à la Terreur. Sans argent, l'estomac vide, il tente de survivre tout en poursuivant son rêve de devenir écrivain. Un soir, tandis qu'il visite l'abbaye de Westminster, il se retrouve enfermé parmi les sépultures royales. Il y fera une rencontre inattendue : une jeune fille venue sonner les cloches de l'abbaye. Des décennies plus tard, dans ses Mémoires d'outre-tombe, il évoquera le tintement d'un baiser.
De nos jours, le vénérable professeur de littérature française Joe J. Stockholm travaille à l'écriture d'un livre sur les amours de l'écrivain. Quand il meurt, il laisse en friche un chapitre consacré à cette petite sonneuse de cloches. Joachim, son fils, décide alors de partir à Londres afin de poursuivre ses investigations.
Qui est la petite sonneuse de cloches ? A-t-elle laissé dans la vie du grand homme une empreinte plus profonde que les quelques lignes énigmatiques qu'il lui a consacrées ? Quelles amours plus fortes que tout se terrent dans les livres, qui brûlent d'un feu inextinguible le coeur de ceux qui les écrivent ?

 

 

≪Appia≫

RUMIZ Paolo

Ed. Arthaud

"De notre aventure, je ne sais pas ce qui est resté le plus clairement imprimé dans mon esprit: les visages ou les paysages, les pierres que nous avons vues ou les atmosphères que nous avons flairées en chemin. Ce qui est sûr, c'est que ce voyage a été le plus terre à terre et en même temps le plus visionnaire de tous ceux que j'ai faits. Tandis que le poids de mon sac à dos m'ancrait fermement au sol, ma tête vagabondait parmi les nuages, à la manière d'un cerf-volant, et en même temps la bonne chère méditerranéenne provoquait d'appétissants courts-circuits avec l'Histoire."

Dans cette bible voyageuse, Paolo Rumiz ressuscite la Via Appia, vingt-trois siècles après sa construction. Après six cent douze kilomètres et vingt-neuf jours de marche, Rumiz dégage cette voie légendaire des toiles d'araignées sous lesquelles l'oubli et l'incurie l'avaient ensevelie. Pas après pas, il nous conduit vers les merveilles cachées de la mère de toutes les routes, plus ancienne et plus variée que le chemin de Compostelle. Ce récit passionnant propose, pour la première fois, une cartographie complète de ce parcours mythique reliant Rome à la Méditerranée. En restituant la Via Appia au patrimoine européen, Paolo Rumiz espère "qu'une armée de voyageurs vienne à leur tour suivre ce fil d'Ariane qui serpente à travers les splendeurs de l'Italie méridionale".

 

 

≪Rhapsodie italienne≫

CABANES Jean-Pierre

Ed. Albin Michel

En 1915, Lorenzo Mori, fils d’une riche famille de Vérone, et Nino Calderone, fermier sicilien, sont appelés sous les drapeaux pour combattre l’Autriche-Hongrie, occasion pour tous deux de fuir une situation délicate. Ils laissent derrière eux la femme aimée. Recrutés dans le corps d’élite des arditi, ils deviennent amis indéfectibles. Mais leurs chemins divergent et les séparent. L’officier s’engage aux côtés de Mussolini et s’illustre dans toutes les guerres italiennes jusqu’en 1945. Sous l’Ange monstre de la mafia de Palerme se cache l’autre, porté disparu…

 

 

 

Jean-Pierre Cabanes brosse une fresque épique couvrant toute l’histoire du fascisme italien, où s’imbriquent étroitement personnages réels et fictifs, dépeints soigneusement, sans manichéisme. Il montre subtilement comment l’ambitieux Mussolini, d’abord socialiste, glisse vers la dictature et une alliance désastreuse avec Hitler et Franco. Comment la guerre, les luttes personnelles et politiques banalisent la violence. Cyniques, les deux principaux héros imaginaires sont pourtant très attachants, vaillants, fidèles à leur engagement. Cependant l’amitié, l’amour comptent davantage pour eux que les idées brumeuses. Car les doctrines divisent les familles dont certains membres s’affrontent dans les batailles, tandis que des ennemis sympathisent. Émergent de belles figures féminines, intelligentes, courageuses, amoureuses mais libres. Un roman dramatique bien construit, hyper-documenté, envoûtant. (L.G. et A.Be.)

 

 

≪Le moine de Moka≫

EGGERS Dave

Ed. Gallimard

L'histoire vraie de Mokhtar Alkhanshali, jeune Américano-Yéménite, qui va tenter l'impossible pour redonner ses lettres de noblesse au café du Yémen. Mokhtar a vingt-quatre ans et travaille comme portier dans un prestigieux immeuble de San Francisco lorsqu'il découvre l'histoire fascinante de l'invention du café, et la place centrale que le Yémen y occupe. Jeune homme brillant, autodidacte et particulièrement débrouillard, il quitte alors sa famille et les Etats-Unis pour retourner sur la terre de ses ancêtres, afin de rencontrer cultivateurs, cueilleurs et trieuses aux quatre coins des régions les plus reculées du pays. Mais en 2015, alors que son ambitieux projet d'améliorer les conditions de travail et de changer l'image du Yémen aux yeux du monde commence à prendre forme, la guerre civile éclate. Les bombes saoudiennes pleuvent impitoyablement, l'ambassade américaine ferme ses portes et Mokhtar va devoir trouver un moyen de sortir du Yémen sans pour autant sacrifier ses rêves ni abandonner ceux qui croient en lui. Avec son inimitable talent de conteur, Dave Eggers livre un récit de formation intime et bouleversant. Grand roman d'aventures contemporain, Le moine de Moka entrelace l'histoire du café, celle d'un pays pris dans la tourmente de la guerre et l'incroyable voyage d'un jeune Américain musulman, courageux et fier de ses origines.

 

 

≪Loin≫

MICHALIK Alexis

Ed. Albin Michel

Pourquoi Charles Lefèvre a-t-il quitté sa famille ? En 2008, Antoine, son fils, à partir d’une carte de 1997 postée en Autriche, part à sa recherche avec Anna, sa soeur fantasque, et Laurent, l’ami journaliste. Dans ce voyage de quatre mois, secrets de famille et identités se dévoilent au gré des pays parcourus, les rencontres ouvrent des portes et répondent à des questions qui mèneront ce trio Loin, d’une Europe à l’Histoire fracturée à l’Arménie, la Turquie et au-delà.

 

 

L’auteur applique à son premier roman les recettes d’écriture du théâtre (il en connaît les ressorts) : répliques cinglantes, drôles et rebondissantes, suspenses, situations bloquées que des hasards toujours miraculeux dénouent. Le lecteur, ballotté dans un récit torrentueux, respire à peine entre deux frontières mouvantes, révise l’histoire politique des continents approchés, vibre aux aventures sentimentales d’un trio qui chemine vers la découverte de soi-même, de sa vraie place. Le jeune journaliste écrit le parcours initiatique d’un héros en pleine mutation psychologique et mêle onirisme et conte – une aïeule arménienne, un peu sorcière, veille et guide sa descendance. L'acceptation des différences comblera l’optimisme des amateurs de divertissements. (A.C. et D.C.)

 

 

≪Les Patriotes≫

KRASIKOV Sana

Ed. Albin Michel

En 1934, Florence Fein, Juive américaine de vingt-quatre ans, quitte seule sa famille pour aller vivre en URSS, attirée par le système socialiste et d’éventuelles retrouvailles avec Sergueï, son coup de foudre. Là-bas, elle refuse d’avouer son erreur, accepte une vie très dure et se marie. Accusée de trahison, elle passe des années dans un camp de travail, comme son mari qui y mourra. Son fils émigre aux États-Unis et il profite en 2008 de l’ouverture des archives du KGB pour élucider ce drame. Mais son petit-fils s’établira en Russie.

 

 

Après un recueil de nouvelles (L’an prochain à Tbilissi, HdN novembre 2015), Sana Krasikov offre une fresque familiale sur trois générations. Elle raconte, d’une écriture prenante, dénuée de pathos, un quotidien de misère et d’oppression totalitaire et révèle le sort de nombreux Juifs américains abandonnés par leur pays. L’histoire romanesque bien émouvante, la caricature des affaires véreuses (aux discussions parfois longues et compliquées) s’insèrent parfaitement dans la réalité politique et historique. Ce beau livre, attachant, décrit un monde paranoïaque, la puissance délétère de toute idéologie et pose des questions sur la responsabilité et les choix à faire dans toute vie, au sein même de turbulences tragiques.  (V.M. et B.T.)

 

 

≪L’ami≫

NUNEZ Sigrid

Ed. Stock

« - Je vais te dire pourquoi j’ai tenu à te parler.
À ces mots, pour une raison mystérieuse, mon coeur se met à battre dans ma poitrine.
- C’est au sujet du chien.
- Du chien ?
- Oui, je voulais savoir si tu serais d’accord pour le prendre. »

Quand l’Épouse Numéro Trois de son meilleur ami récemment décédé lui fait cette demande, la narratrice a toutes les raisons de refuser. Elle préfère les chats, son appartement new-yorkais est minuscule et surtout, son bail le lui interdit. Pourtant, elle accepte. La cohabitation avec Apollon, grand danois vieillissant de la taille d’un poney, et cette écrivaine, professeure à l’université, s’annonce riche en surprises.

Magnifique exploration de l’amitié, du deuil, de la littérature et du lien qui nous unit aux animaux, L’Ami est un texte unique en son genre.

 

 

≪La panthère des neiges≫

TESSON Sylvain

Ed. Gallimard

Le narrateur accompagne au Tibet Vincent Munier, célèbre photographe animalier. Ils vont à la rencontre de la panthère des neiges mais aussi de troupeaux de yacks, d’oiseaux de proie, de chèvres bleues, de loups, antilopes, gazelles et autres splendides animaux sauvages. Sur les hauts plateaux, à plus de 4500 m d’altitudes, par -30°, la nature est grandiose, les bêtes ne se laissent pas facilement approcher. Il faut voir l’invisible… Leur petite équipe s’arrête quelques jours chez une famille de nomades, pratiquant l’art de l’affût, passant des journées entières à attendre l’improbable…

 

 

Fidèle à lui-même, Sylvain Tesson (Un été avec Homère, NB septembre 2018) arpente la Terre et cherche à la comprendre. Amoureux de la nature et de la faune, il s’enthousiasme, admire, savoure la Beauté et l’instant. À contre-courant de la modernité et de l’homme augmenté, il profite des longues journées de veille pour apprendre la patience, « une vertu suprême » et cherche à « se contenter du monde, lutter pour qu’il demeure ». Il ne faut pas espérer, mais simplement « vénérer le monde ». C’est un joli livre d’aventure et de méditation, aux phrases ciselées, poétiques ; un retour aux sources. (V.A. et S.D.)

Octobre 2019

≪La vie en chantier≫ 

FROMM Pete

Ed. Gallmeister

 

Taz et Marnie, très amoureux mais sans le sou, vivent depuis sept ans dans une maison délabrée du Montana, qu’ils retapent à grand peine, quand un bébé s’annonce. Malheureusement l’accouchement se passe mal et Taz reste seul, désemparé, avec une petite fille. Il sombre dans la dépression, ne voulant voir personne, parlant sans cesse à la morte, laissant tomber son métier de charpentier ébéniste qu’il exerçait en artiste au mépris de l’argent. Seul son meilleur ami parvient peu à peu à le tirer de son hébétude…

 

 

Ce n’est pas un hasard si l’histoire se passe dans le Montana. On connaît l’amour de Pete Fromm pour cette région sauvage (Le nom des étoiles, NB juin 2016). Mais il aime aussi explorer les sentiments humains. Il signe ici un joli livre, empreint d'une sentimentalité touchante, sur le travail de deuil, l’amitié, la paternité, le pouvoir consolant de la nature. Le portrait qu’il fait de son personnage anéanti par son rêve brisé, père aimant, mais dépassé par le poids de ses responsabilités, les diverses étapes de l’éveil de l’enfant, le beau métier du bois sont décrits de façon très juste en mots très simples, pleins d'humanité. (M.-N.P. et C.G.)

 

 

≪Dévorer le ciel≫ 

GIORDANO Paolo

Ed. du Seuil

 

Les Pouilles, années 90. Teresa, quatorze ans, rencontre pour la première fois « les garçons de la ferme », celle qui jouxte la maison de sa grand-mère. Sous la direction charismatique de Cesare, Nicola, Bern et Tommaso grandissent dans un profond respect de la nature et de la Bible. Teresa découvre l’amour avec l’énigmatique Bern, à l’insu des autres croit-elle. Elle abandonne ses études pour revenir à la ferme sans imaginer ce que lui réservent les vingt ans à venir.

 

 

Paolo Giordano (Les humeurs insolubles, HdN octobre 2015) signe ici un roman magistral dans sa construction en trois temps savamment entrelacés ; l’adolescence, la vie communautaire, l’échec et la fuite. Les Pouilles comme décor et une ferme confite de secrets, dédiée à la préservation de la nature et au refus du monde matérialiste. L’auteur aborde avec sensibilité les rapports complexes d’une jeunesse en quête d’idéal confrontée à la réalité et à leur envie de changer le monde, ils veulent Dévorer le ciel. Il déroule une saga palpitante entre amour, amitié, rivalités, rêves et désillusions. (C.P. et L.C.)

 

 

≪Par les routes ≫   

PRUDHOMME Sylvain 

Ed. Gallimard

 

Sacha, écrivain en mal d’inspiration, déménage dans une petite ville du sud. Il y retrouve un ami perdu de vue depuis quinze ans. Cet homme étrange habite avec sa compagne Marie et son fils Augustin et se déplace systématiquement en auto-stop sans but précis. À chaque échappée, Marie voyage au gré de ses cartes postales ou photos. Ces abandons répétés sans raison sont difficiles à vivre.

 

 

Un nouveau parfum de nostalgie des années quatre-vingt pour ce conte de l’écrivain-journaliste Sylvain Prudhomme (Légende, NB décembre 2016), qui emporte vers des rencontres aléatoires sur les routes de France à l’époque de « Blablacar ». Sans prendre parti pour une vie rangée ou nomade, c’est l’amitié, le désir et l’envie de découvrir d’autres existences, qui animent « l'auto-stoppeur ». Envoûté par la fuite vers un avenir incertain, ce héros du hasard cherche à convaincre les autres de la pertinence de sa démarche pour se convaincre lui-même. Si l’écriture du début est hachée, elle s’enrichit et s’arrondit au fil de cette fable sur le rêve que tous les hommes vivent heureux ensemble. Une lecture étonnante comme un trajet dans un habitacle de voiture avec un personnage fantasque. (M.-F.C. et S.D.)

 

 

≪Le coeur de l'Angleterre≫

 COE Jonathan 

Ed. Gallimard

À cinquante ans passés, Benjamin Trotter et sa soeur Loïs vivent toujours près de Birmingham. Leur père est très âgé alors que leur mère vient de mourir ; l’Angleterre se déchire à propos du Brexit. Déçus par la vie et leurs amours envolées, ils essaient de réagir et d’envisager les prochaines années de manière plus positive. Benjamin se lance dans une carrière d’écrivain, Loïs essaie d’oublier ses traumatismes en déménageant. Sophie, sa fille, se passionne pour son travail, mais n’est pas certaine d’aimer son mari…

 

 

Jonathan Coe (Expo 58, NB avril 2014) reprend les personnages de ses romans Bienvenue au club (NB mars 2003) et Le cercle fermé (NB janvier 2006) pour mener une satire politique et sociétale sur les années 2010 en Grande-Bretagne. L’après Blair, la fièvre joyeuse des jeux olympiques en 2012 et surtout comment a-t-on pu arriver au vote d’une sortie d’Europe en 2017 ? De nombreux personnages interviennent, aux opinions politiques variées selon les milieux sociaux et les différentes origines. Chacun mène ses petites affaires et tous se croisent grâce à une intrigue un peu mince. On retrouve les préoccupations habituelles de l’auteur, le temps qui passe, son amour inconditionnel mais critique pour son pays, son humour se teintant d’ironie à propos de ses contemporains. (V.A. et M.-F.C.)

 

 

≪Ici n'est plus ici≫

ORANGE Tommy

Ed. Albin Michel

 

Lorsque Tony réalise qu'il a une tête d'Indien, sa vie bascule, tout comme celle de Dene qui souhaite raconter la vie de son peuple, ou d'Opale Viola ou encore d'Edwin. Tous ces Indiens de la tribu Cheyenne ne se connaissent pas et vivent à Oakland dans la misère, l'alcoolisme, la drogue et la violence, sur une terre qui ne leur appartient plus. Cependant, leur destin va les rassembler à l'occasion de leur grande fête, le Pow-Wow.

 

 

Tommy Orange écrit son premier roman sous la forme de chapitres dédiés à chacun des douze autochtones d'âges différents en quête d'identité, qui évoluent, mais sans sortir de la médiocrité. L'écriture est précise, la cruauté de l’existence des Indiens, qui luttent pour conserver leurs traditions dans une Amérique prête à les « avaler », est bien décrite. Malgré un point de vue victimaire et quelque peu manichéen, ce roman donne une bonne idée de la vie des Amérindiens, dépouillés de leur territoire, trahis, massacrés, relégués et maintenant urbanisés, tous leurs repères disparus.  (C.M. et M.S.-A.)

 

 

≪La part du fils≫  

COATALEM Jean-Luc 

Ed. Stock

 

Il n’a pas connu Paol, son grand-père né à Brest en 1894, chaînon manquant de son histoire familiale. Lui, le petit-fils, évoque la vie de Paol, poilu de la guerre de 14, ancien officier colonial, baroudeur en Indochine, Résistant et profondément attaché à sa Bretagne. Une lettre anonyme le dénonce et l’envoie mourir en 1943 dans un camp nazi. Fasciné par cet épisode mystérieux et tragique, combattant le silence de son père, le petit-fils se met en quête. 

 

 

Écrivain voyageur, Jean-Luc Coatalem (Mes pas vont ailleurs, NB octobre 2017) se fait explorateur d’archives, remonte le temps, parcourt le monde et la terre bretonne, force quelques rares témoins et espère, en vain, un dénouement rassurant à ses larges investigations. D’une plume sensible, pudique, l’auteur, à la première personne, structure ses recherches inabouties et, afin de dépasser une histoire intime et la faire entrer dans l’universel, il fantasme et puise dans le romanesque. Parfois, on se perd un peu. Mais la superbe écriture, le rythme de longues phrases denses et poétiques redessinent ce héros qui a pris toute sa place dans la lignée, et a comblé le vide existentiel du romancier. (A.C. et B.D.)

 

 

≪Âme brisée≫ 

MIZUBAYASHI Akira

Ed. Gallimard

 

Tokyo, 1938, en plein conflit sino-japonais : une répétition du quatuor composé du japonais Yu et de trois de ses amis, étudiants chinois, est brutalement interrompue par l’irruption de soldats qui les arrêtent et piétinent le violon de Yu sous les yeux de son fils. Choqué, un lieutenant mélomane en remet les débris au jeune garçon. Adopté par un ami français de son père disparu, ce dernier devient en France un luthier reconnu. Sur ses vieux jours il voit resurgir le passé d’une façon inattendue.

 

 

On retrouve dans ce magnifique roman, d’une très grande élégance et d'une remarquable sensibilité de style et de sentiments, le thème de la musique cher à Mizubayashi (Un amour de Mille-Ans, NB mai 2017). Ayant étudié en France, ancien élève de l’ENS, il écrit directement en français avec un grand sens des nuances pour évoquer sa perception de la musique, le déracinement, le deuil. Les mots choisis avec soin célèbrent l’unité autour de cet art, au-delà des antagonismes nationaux et de la violence, l’intense émotion qui émane d’un morceau de Schubert, de Bach, de Berg. Il parle merveilleusement de la subtile correspondance entre les meurtrissures de l’âme humaine et l’âme du violon. Un vrai bonheur ! (J.M. et M.-N.P.)

 

 

≪Girl≫

  O’BRIEN Edna 

Ed. Wespieser

 

Née en 1930 dans un petit village catholique de l'ouest de l'Irlande, Edna O'Brien grandit dans une ferme isolée entre une mère sévère et un père alcoolique. Après le pensionnat, elle part à Dublin pour suivre des études en pharmacie. En 1952, elle épouse, contre l'avis de sa mère, l'écrivain juif d'origine tchèque Ernest Gébler, et s'installe à Londres. Ses débuts littéraires datent de 1960, année de la parution du premier volet de la trilogie qui la rendit célèbre, The Country Girls Trilogy. Ses premiers livres, publiés en Angleterre, ont longtemps été interdits en Irlande, parce qu'ils décrivaient de manière supposément subversive l'éveil à la sensualité de ces " filles de la campagne ". Bientôt divorcée, Edna O'Brien élève seule ses deux fils, au coeur des Swinging Sixties londoniennes, sans pourtant jamais quitter sa table de travail. Elle écrit depuis près de soixante ans, et son oeuvre est publiée dans le monde entier. Lauréate en 2018 du prix P EN America/Nabokov pour la portée internationale de son oeuvre, elle a été anoblie par Elisabeth II. Depuis près de dix ans que Sabine Wespieser éditeur publie son oeuvre, Edna O'Brien a écrit cinq nouveaux livres : Crépuscule irlandais (roman, 2010) ; Saints et Pécheurs (nouvelles, 2012) ; Fille de la campagne (mémoires, 2013) ; Les Petites Chaises rouges (roman, 2016) et Girl (roman, 2019), dont l'édition française paraît simultanément avec l'édition originale chez Faber, et dont les droits ont déjà été

 

 

≪Opus 77≫

RAGOUGNEAU Alexis 

Ed. Viane Harny

 

" Un jour, dans mille ans, un archéologue explorera ton refuge. Il comprendra que l'ouvrage militaire a été´ recyclé en ermitage. Et s'il lui vient l'idée de gratter sous la peinture ou la chaux, il exhumera des fresques colorées intitulées La Vie de David Claessens en sept tableaux. Je les connais par cœur, ils sont gravés à tout jamais dans ma médiocre mémoire, je peux vous les décrire, si vous voulez faire travailler votre imaginaire :

L'enfant prodige choisit sa voie.
Il suscite espoirs et ambitions.
Le fils trébuche, s'éloigne, ressasse.
Dans son exil, l'enfant devient un homme.
Le fils prodigue, tentant de regagner son foyer, s'égare.
Blessé, il dépérit dans sa prison de béton.
Mais à la différence des tapisseries de New York, ton histoire est en cours ; il nous reste quelques tableaux à écrire, toi et moi, et je ne désespère pas de te faire sortir un jour du bunker. La clé de ton enclos, de ta cellule 77, c'est moi qui l'ai, David. Moi, Ariane, ta sœur. "

 

≪Ceux que je suis≫

  DORCHAMPS Olivier 

Ed. Finitude

 

"Le Maroc, c'est un pays dont j'ai hérité un prénom que je passe ma vie à épeler et un bronzage permanent qui supporte mal l'hiver à Paris, surtout quand il s'agissait de trouver un petit boulot pour payer mes études". Marwan est français, un point c'est tout. Alors, comme ses deux frères, il ne comprend pas pourquoi leur père, garagiste à Clichy, a souhaité être enterré à Casablanca. Comme si le chagrin ne suffisait pas. Pourquoi leur imposer ça ? C'est Marwan qui ira. C'est lui qui accompagnera le cercueil dans l'avion, tandis que le reste de la famille arrivera par la route. Et c'est à lui que sa grand-mère, dernier lien avec ce pays qu'il connaît mal, racontera toute l'histoire. L'incroyable histoire. Ceux que je suis est un roman pudique et délicat, à la justesse toujours irréprochable.

Septembre 2019

≪Soif≫

NOTHOMB amélie  

Ed. Albin Michel

Jésus vient d’être arrêté et assiste, désarmé, à son procès. Les miraculés au lieu de le soutenir l’accablent. Ponce Pilate lui accorde une ultime nuit avant la cruelle et infamante crucifixion. Face à la mort, le Christ ne cache pas sa peur de la souffrance puis raconte chaque étape de son épouvantable calvaire, soutenu par l’amour de Marie-Madeleine et de sa mère.

 

 

Amélie Nothomb (Les prénoms épicènes, NB novembre 2018) propose un nouvel Évangile en rapportant le monologue intérieur d’un Christ soucieux de « corriger » les récits des Apôtres. Jésus se veut pleinement humain et célèbre en épicurien tous les plaisirs des sens que permet l’incarnation. Il ne recule pas devant le blasphème et remet en question certains dogmes, comme la Rédemption. Ce Christ humaniste et amoureux rejette avec force le culte du martyre et se désole de savoir que la postérité vénérera un sacrifice que rien ne justifie. Ce roman très inspiré exalte la figure d’un Christ bienveillant et humble mais aussi iconoclaste. L’auteure propose une définition séduisante de la foi, en filant la métaphore de la soif, à une époque où le mysticisme se confond parfois avec le fanatisme.  (A.K. et A.-M.D.)

 

 

≪Mur Méditerranée≫

DALEMBERT Louis-Philippe.

Ed. Sabine Wespieser

Pour elles, c’est l’Europe à tout prix : Chochana, Nigériane juive ; Semhar, Erythréenne chrétienne ; Dima, Syrienne musulmane. Elles fuient la guerre, certaines la misère et l’absence d’avenir. Trois femmes aux trajectoires différentes, qui les font aboutir à Tripoli dans les mains des passeurs, où un rafiot de fortune doit les mener à bon port. Mais après avoir subi quels calvaires…

 

 

Il y a des sujets que l’on préfèrerait ne pas connaître en détails. Mur Méditerranée est de ceux-là. On participe de l’intérieur à la vie des villages de l’Afrique d’aujourd’hui, on espère et on souffre avec ces gens ballottés d’un camion à l’autre, d’un hangar à l’autre, sortes de mini-camps de concentration. Les humiliations, les coups, les punitions, les vols, les viols, les assassinats… Rien ne nous est épargné. Le monde doit savoir… Certes, il s’agit d’un roman où l’amitié réchauffe le coeur. Certes, l’humanité de la bourgeoise syrienne bouscule notre confort intellectuel. Mais malgré une écriture qui cherche la chaleur, l’auteur (Avant que les ombres s'effacent, NB avril 2017) nous jette dans l’horreur glaçante de l’immigration et de l’exil. Sans ménagement.  (C.Go. et C.R.P.)

 

 

≪La mer à l’envers≫

DARRIEUSSECQ Marie   

Ed. POL

Le paquebot sur lequel Rose et ses enfants font une croisière en Méditerranée recueille un groupe de migrants. Prise de pitié pour Younès, jeune rescapé nigérien, Rose lui donne le téléphone portable de son fils. À son retour à Paris, elle reçoit sans arrêt des messages de son protégé, mais n’y répond pas. Ce n’est qu’après être revenue s’installer au pays basque que naît l’idée de le recueillir chez elle. Un jour, Younès appelle de Calais.

 

 

Marie Darrieussecq (Notre vie dans les forêts, NB octobre 2017) traite de belle façon le thème difficile des migrants à travers les tiraillements d’une femme entre ses obligations de mère, d’épouse, de pédopsychiatre et son envie d’altruisme. Les occupations quotidiennes laissent le plus souvent peu de place aux élans du coeur ou à l’héroïsme. À quoi ou à qui donner la priorité sans se sentir coupable ? Faut-il faire partager son engagement à ses proches ? Un portrait féminin subtil, dans un style vivant qui mêle justesse psychologique, poésie, ironie, et gravité. Loin d’être misérabiliste ou moralisateur, ce roman souligne les difficultés et les satisfactions procurées par l’accueil inconditionnel de l’étranger. Le sujet est traité avec tact et de façon limpide. (L.D. et T.R.)

 

 

≪Les petits de décembre≫

KAOUTHER Amidi

Ed. Seuil

Alger, Février 2016. Trois enfants, Inès, Jamyl et Mahdi, jouent au foot sur le terrain vague de la cité du 11 Décembre 1960, mémoire des manifestations indépendantistes. Le temps a passé, mais l'opposition au pouvoir des chefs reste vivace. Mohamed et Chérif, retraités de l’armée, déplorent cet état de fait après avoir dû y obéir. De loin, ils observent les conciliabules des enfants. Se doutent-ils que la colère gronde depuis que deux généraux ont prétendu être propriétaires de ce lieu réservé aux jeux de ballon ?

 

 

Kaouther Adimi parle à nouveau avec amour de son pays (Nos richesses, NB octobre 2017). Elle admire le courage des femmes, plébiscite une jeunesse éprise de liberté et revendique avec elle l’abolition de la dictature militaire. Grâce au journal d’une moudjahida, elle retrace l’Algérie, de la colonisation à l’indépendance, les partisans des traditions affrontant les tenants de l’ouverture, l'islamisme opposé à l’émancipation des femmes, à l’avènement de la démocratie. Trois générations finement analysées, des portraits ciselés par une écriture limpide mêlant émotion et références historiques : que d'atouts pour ce roman vivant, bien construit. Une belle réussite ! (M.-A.B. et J.D.)

 

 

≪Où bat le coeur du monde≫

HAYAT Philippe.

Ed. Calmann-Lévy

À la vue de son père assassiné lors d’une émeute à Tunis, le jeune Darius devient subitement muet. Blessé, il boite. Stella, sa mère, le pousse dans ses études pour accomplir le rêve paternel, mais, doublement handicapé, il n’y parvient qu’aidé par un professeur compréhensif. Quand il découvre la clarinette il se transforme et révèle un grand talent. Il suit les troupes américaines pour puiser aux sources du jazz aux États-Unis, mais affronte l’oubli et la misère. Soutenu par sa compagne, il trouve enfin sa voie.

 

 

Philippe Hayat choisit de raconter l’éclosion d’un talent musical exceptionnel, inhabituel dans le milieu d’origine de son héros. Seul Blanc parmi des groupes noirs célèbres, le jeune homme est tour à tour adulé puis ignoré par les idoles des années quarante et cinquante du jazz américain. L’itinéraire du garçon est particulièrement émouvant car la rupture avec sa mère est douloureuse et la pauvreté une obsession permanente. Les circonstances dressent d’innombrables obstacles devant lui : révoltes arabes, reconquête de l’Italie en 1943, violences sociales de l’Amérique profonde, ségrégation et racisme. La description des activités musicales des groupes, des techniques et interprétations, est très détaillée, parfois un peu longue ou difficile à suivre. (S.La. et A.Lec.)

 

 

≪Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon≫

DUBOIS Jean-Paul

Ed. L’Olivier

Pourquoi le gentil Paul Hansen est-il incarcéré à Montréal ? Serviable, il travaillait comme gardien et factotum dans une résidence où il réparait les choses... et les êtres. Il raconte son quotidien dans la cellule qu’il partage avec Patrick, une brute épaisse et amicale, fana de moto, sans pudeur, sans peur – sauf des souris –, et évoque ses chers disparus. Son père, un pasteur danois qui a perdu la foi, mort criblé de dettes. Sa mère, indépendante et indifférente, à la tête d'un cinéma à Toulouse. Son épouse, une Irlando-Algonquine a disparu aux commandes de son avion...

 

 

Jean-Paul Dubois connaît bien le Canada. Comme dans ses précédents romans (La succession, NB octobre 2016), le narrateur s'appelle Paul, est toulousain, aime son chien... Il s’exprime sur un ton désabusé avec un goût prononcé pour les détails techniques et la vie des autres. La construction faisant alterner, sans originalité, passé et présent donne à la lecture de la fluidité. Grâce à l'humour distancié et à l’écriture, belle, imagée, sereine, le récit, parsemé de personnages savoureux, ne sombre jamais dans la tragédie malgré le poids des héritages familiaux et le désenchantement de toute 

 

 

≪Nous étions nés pour être heureux≫

DUROY Lionel

Ed. Julliard

Paul écrit depuis trente ans des romans sur le désastre familial que fut son enfance. Ses neuf frères et soeurs ont pour la plupart rompu avec lui, honteux de voir leur histoire révélée au grand jour, et ses quatre enfants ne connaissent ni leurs oncles et tantes, ni leurs cousins germains ; et voici que la fratrie entreprend de s’excuser auprès de lui de ce long rejet. Heureux, Paul les invite à déjeuner dans sa maison champêtre…

 

 

La journée de fête est orchestrée par Paul, qui revient sur son passé à la lumière du présent. Après Le Chagrin (NB juillet 2010), Colères (NB juin 2011), Vertiges (NB novembre 2013), Eugenia (NB mai 2018), l’auteur dissèque encore son histoire dont l’écriture l’a sauvé de la dépression : elle est sa vie. Les personnages sont profondément humains, partagés entre une vieille affection et une certaine forme de rejet dont ils arrivent à parler ensemble et qu’ils apprivoisent. Les petits-enfants, certains souvenirs, la simplicité de la vie rustique enchantent cette journée de retrouvailles d’où, grâce à l’affection, peur et colère semblent exorcisées et Paul se surprend lui-même dans son acceptation de l’altérité. Une sage tendresse habite ce livre. (E.B. et C.-M.T.)

 

 

 ≪Dégels≫

PHILLIPS Julia

Ed. Autrement

Deux soeurs de huit et onze ans sont enlevées dans la capitale du Kamtchatka, péninsule située en Extrême-Orient russe. Une femme a vu l’enlèvement et a pu fournir un vague signalement de l’homme et de sa voiture. Bien qu’elle se raréfie au cours des mois, l’émotion nourrit les conversations et vient perturber la vie d’une dizaine de femmes : mère, amies, voisines, témoin, policières…

 

 

Julia Philips a vécu deux ans au Kamtchatka avant d’écrire son premier roman. L’histoire qui suit le premier chapitre en révèle plus sur cette province que sur le mystère de l’enlèvement : la nostalgie de l’URSS « d’avant », le racisme des Russes "blancs", la misogynie latente, la corruption, la violence faite aux femmes et la force du mot « destin » dans l’âme russe. Le récit avance mois par mois comme onze nouvelles traversées par un même fil : des portraits de femmes admirables ayant un rapport avec « l’affaire ». De son écriture puissante et sophistiquée, Julia Phillips offre un roman littéraire et sociologique, construit comme un thriller, dont la fin laisse abasourdi. Avec Dégels, le cercle des écrivains s’agrandit. (C.Go. et M.-F.C.)

 

≪Casse-gueule≫

GOROKHOFF Clarisse

Ed. Gallimard

Ava est-elle encore Ava ? Son visage a été détruit par un inconnu dans une rue de Paris, et tout le monde voudrait le réparer : sa mère, son homme, les médecins... Mais Ava sait qu'il y a une autre manière de voir le monde et de se faire voir de lui. Défigurée, elle se sent revivre

 

 

≪Rien n’est noir≫

BEREST Claire

Ed. Stock

« À force de vouloir m’abriter en toi, j’ai perdu de vue que c’était toi, l’orage. Que c’est de toi que j’aurais dû vouloir m’abriter. Mais qui a envie de vivre abrité des orages? Et tout ça n’est pas triste, mi amor, parce que rien n’est noir, absolument rien.
Frida parle haut et fort, avec son corps fracassé par un accident de bus et ses manières excessives d’inviter la muerte et la vida dans chacun de ses gestes. Elle jure comme un charretier, boit des trempées de tequila, et elle ne voit pas où est le problème. Elle aime les manifestations politiques, mettre des fleurs dans les cheveux, parler de sexe crûment, et les fêtes à réveiller les squelettes. Et elle peint.
Frida aime par-dessus tout Diego, le peintre le plus célèbre du Mexique, son crapaud insatiable, fatal séducteur, qui couvre les murs de fresques gigantesques.»

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